Scénario

“Les traités actuels et tous les précédents ne peuvent être modifiés qu’à l’unanimité des Etats membres ou ne prévoient pas de procédure de révision. Mais il est faux d’en déduire l’impossibilité de réformer l’Union. L’expérience le prouve : au lieu d’utiliser la procédure de révision à l’unanimité, les Etats membres ont contourné cette difficulté en empilant les traités.

Notre stratégie d’insoumission est une stratégie diplomatique, avec pour vis-à-vis des gouvernements des autres Etats membres, qui seront tantôt des alliés, tantôt des adversaires. En d’autres termes, nous engagerons un processus de négociation fondé simultanément sur un rapport de forces et sur des jeux d’alliances évolutifs. Nos interlocuteurs ne seront pas des statues de sel, muettes, et le résultat final sera le fruit de nos interactions. Cette stratégie doit donc, pour couvrir les cas de figure prévisibles, prendre la forme d’un scénario à tiroirs. (…)

Son application commencera le jour où La France Insoumise ou, le cas échéant, une force politique plus large prendra le pouvoir par les urnes. Le nouveau gouvernement proposera alors aux autres Etats membres d’adopter un nouveau traité refondateur de l’Union européenne. (…)

Selon la mesure considérée, nous pourrons nous satisfaire de l’inscrire dans un nouveau traité européen comme objectif à atteindre à moyen terme, ou faire au contraire de son application immédiate une condition sine qua non. Bien évidemment, le principe même d’une négociation implique que nous n’obtenions pas nécessairement satisfaction sur tout. Quoi qu’il en soit, il appartiendra au peuple français d’approuver ou pas le fruit de la négociation, en se prononçant par référendum.

Dans l’attente du résultat de la négociation, la France désobéira à toutes les règles qui empêchent l’application de notre programme de gouvernement, “L’avenir en commun”. Ce sera donc une option de retrait unilatéral et provisoire. trois issues deviennent ensuite possibles.

La première : l’adoption d’un traité refondateur de l’Union européenne par ses Etats membres.

La deuxième : un accord pour que la France et tous les pays favorables à sa proposition initiale procèdent à une option de retrait collective. ces pays se soustrairont ainsi à toutes les règles de l’Union empêchant la mise en oeuvre de leur projet politique. Par définition, la liste de ces pays ne peut être dressée aujourd’hui, car elle dépendra des choix exprimés par les gouvernements du moment.

La troisième issue conduit à une porte close : c’est le blocage de la négociation avec “nos partenaires européens”. Les guillemets s’imposent, car, en l’état actuel du rapport de forces géopolitique dans l’Union, l’expression “nos partenaires européens” s’apparente à une périphrase pour désigner le gouvernement de l’Allemagne, seule puissance en mesure de bloquer une négociation ouverte par la France. Berlin, et non Paris, prendrait alors la responsabilité d’enclencher l’engrenage conduisant la France et ses alliés à sortir des traités pour fonder ensemble une nouvelle construction européenne (…) — élargie, le cas échéant, à des pays européens non membres de l’Union européenne ou à une partie de la rive sud de la Méditerranée.”

Tomas Guénolé, “Face à Bruxelles, le pari de l’insoumission”,
Le Monde diplomatique, mars 2019

Auteur/autrice : Serge Victor

Militant de gauche, écosocialiste, féministe, autogestionnaire

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