Non, Conspiracy Watch, ce n’est pas la fin du Média !

Le 28 juillet dernier paraissait sur le site Conspiracy Watch un article signé Elie Guckert intitulé « Clap de fin pour le Média ? « 

Etant sociétaire du Média et engagé activement au sein de cette coopérative de presse je n’avais pas apprécié le contenu de l’article. J’y avais relevé quelques erreurs factuelles, comme le fait que Denis Robert y est présenté comme ayant été « remplacé à la rédaction en chef par Théophile Kouamouo ». C’est un peu anecdotique, mais en réalité, Théophile Kouamouo était déjà rédacteur en chef au Média quand Denis Robert y travaillait, lequel Denis Robert n’était pas rédacteur en chef mais directeur de la rédaction. C’est un détail qui a malgré tout son importance, car un lecteur non averti pourrait, en lisant l’article de Guckert, s’imaginer que Théophile Kouamouo aurait voulu prendre la place de Denis Robert alors que la rédaction a juste souhaité remplacer le poste de directeur de la rédaction par un comité éditorial. En tout cas, la remarque n’a pas dû plaire à Guckert car il m’a aussitôt bloqué sur Twitter (j’ai appris par la suite qu’il avait également bloqué d’autres socios et des salarié.e.s du Média), se privant ainsi de la possibilité de pouvoir recevoir des rectifications au contenu de son article.

M’étant fait récemment à nouveau exhiber cet article sur les réseaux antisociaux, je me décide aujourd’hui à en faire une analyse critique. Mieux vaut tard que jamais.

Comme il est toujours bon de savoir d’où l’on parle, je précise que je suis moi-même socio du Média, membre du collectif informel des Socios Engagés (merci aux camarades pour leur relecture de ce billet et leurs suggestions). Politiquement, je viens plutôt de la mouvance communiste libertaire et antifasciste. J’ai rallié le Parti de Gauche en 2012, puis la France Insoumise en 2016, avant d’émettre des critiques sur le fonctionnement de celle-ci en 2017, de quitter le PG, de militer pour une liste locale municipaliste libertaire opposée à la liste PS-EELV mais aussi à la liste FI-PCF aux élections municipales de 2020 dans ma commune. Je suis aussi syndiqué à SUD Education. Je n’ai aucune sympathie ni pour Poutine ni pour Bachar El Assad ni pour Maduro ni pour le régime iranien ni pour le régime chinois. Je soutiens électoralement la NUPES faute de mieux. Je suis pour l’abolition de la propriété lucrative et le salaire à vie.
Je ne vais pas éplucher le CV du journaliste Elie Guckert dont je critique ici l’article. Qu’il collabore entre autres à Street Press ou Médiapart m’est plutôt sympathique a priori (et soit dit en passant, aux fachos et fans de Poutine qui viendraient à lire ce billet et essaieraient d’y trouver des raisons de harceler Guckert, je dis juste : no pasaran et allez manger vos morts).
Mais une information mérite peut-être d’être portée à la connaissance des lecteurs de son article sur le Média pour Conspiracy Watch : Elie Guckert affiche sur Twitter une proximité certaine avec Maud Le Rest et Elsa Margueritat, deux anciennes journalistes pigistes du Média, qui l’ont quitté en 2021 en très mauvais termes et se répandent volontiers depuis en sarcasmes sur les réseaux contre leur ancien employeur. NB : Maud a depuis notamment publié un papier sur ASI, qui a ensuite publié un article à charge contre le Média faisant la part belle aux rancoeurs de Maud et Elsa, article qui a dû être corrigé plusieurs fois en raison d’erreurs factuelles pointées par le rédacteur en chef du Média ; Elsa, de son côté, est allée travailler pour Marianne puis le Figaro (sic).

Comme Guckert manie avec dextérité la technique du déshonneur par association (autrement dit le « maraboutdficellisme »), on est tenté de lui retourner le procédé : puisque lui-même mentionne l’air de rien que Théophile Kouamouo travaille parfois à côté du Média pour la chaîne Voxafrica et précise que la même chaîne emploie aussi le sulfureux « influenceur pro-Poutine Kemi Seba » (c’est jeté comme ça pour salir sans bien évidemment aucune preuve d’un quelconque lien entre les deux hommes ni sans analyse de la structure ou de la ligne éditoriale de Voxafrica), puisque Guckert tient aussi à préciser que le Média s’est inspiré de la chaîne The Young Turks qui soutenait la campagne de Bernie Sanders aux Etats-Unis, et que cette chaîne avait recruté comme chroniqueur un certain Jimmy Dore, « conspirationniste récompensé par un lobby pro-Assad »… puisque, donc, le Média est associé à l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours qui a été récompensé par Assad… alors, convenons-en, on peut remarquer d’un air entendu (suivez mon regard) qu’Elie Guckert échange des blagounettes sur Twitter avec des copines qui ont essayé de décrocher un CDI dans un média complotiste poutinophile. #lesvraissachent.

Car l’article commence très fort dès le titre : « Clap de fin pour le Média ? » interroge Guckert, avant de montrer par son accroche qu’il s’en réjouit d’avance, la « très insoumise webtélé lancée en 2017 » étant d’emblée pointée pour ses « accents complotistes et poutinophiles ». Assurément, un tel média mériterait bien un clap de fin, non ? Sauf que cette accusation est plus que contestable, comme on le verra plus loin. D’ores et déjà, on peut s’interroger sur l’insistance à qualifier le Média de « très insoumise webtélé ». Elie Guckert se présente-t-il par exemple comme auteur pour le très social-libéral et réactionnaire (pour ne pas dire vallsiste) Conspiracy Watch ? Car le fondateur du site, Rudy Reichstadt, vient du PS, a été missionné en 2015 par Valls et a été signataire en 2016 du manifeste du très islamophobe et réactionnaire « Printemps républicain ».

Il est vrai que le Média a été créé par la directrice de communication de la campagne de Mélenchon en 2017, avec des militants de la FI, il est vrai également que l’actuel député David Guiraud a été chroniqueur de la Contre-Matinale du Média durant la saison 2021-2022 et que l’ancien candidat de la FI Taha Bouhafs a été journaliste au Média, mais le même Média a aussi viré la directrice de communication de la FI (et depuis lors, Jean-Luc Mélenchon n’a plus jamais daigné évoquer le Média et encore moins y mettre les pieds, même lorsqu’invité comme d’autres candidats de gauche durant la campagne pour l’élection présidentielle de 2022), a été en conflit juridique avec elle, et plus récemment, n’a pas hésité à critiquer la gestion de l’affaire Quatennens par la FI. Pourtant, la presse bourgeoise, lorsqu’elle mentionne le Média (jamais pour relayer ses enquêtes mais plutôt pour se délecter de ses crises internes), continue à le présenter comme « télé insoumise » ou « télé Mélenchon ». Elie Guckert s’inscrit donc ici tout à fait dans le récit dominant, sourd à la mainmise capitaliste et idéologique de milliardaires de droite ou d’extrême-droite sur les médias, mais goguenard (au mieux) ou indigné (au pire) par les liens entre la mouvance insoumise (ou plus généralement la gauche radicale) et le Média. Au cas où le lecteur n’aurait pas compris le message, Guckert va d’ailleurs qualifier plus loin le Média de « site proche de la France insoumise (LFI) ». Plus loin encore, il martèle : « Malgré les nombreuses restructurations internes effectuées depuis, cette chaîne « indépendante » n’a jamais vraiment rompu ses attaches avec le mouvement mélenchoniste. Comme le rappelle Arrêt sur Images, l’actuel président du directoire et directeur général du Média, Thomas Dietrich, était décrit en 2020 par Africa Intelligence comme un conseiller de Jean-Luc Mélenchon sur l’Afrique. » Le parti pris de Guckert est ici de mettre en doute l’indépendance du Média, mentionnée avec des guillemets ironiques. Il ne lui viendra pas à l’idée que Thomas Dietrich puisse avoir conseillé Mélenchon et néanmoins être indépendant, au point de critiquer ouvertement à l’antenne certaines prises de position de JLM.

Guckert énumère ensuite des cas selon lui rédhibitoires de « complotisme » ou « poutinophilie » : un édito sur la Syrie de Claude El Khal en 2018, une fausse information toujours en 2018 (l’affaire Tolbiac), une interview de Chouard en 2019, Alain Corvez invité en avril et mai 2018 (sur la Syrie), un édito d’Alexis Poulin en avril 2018 (sur l’affaire Skripal), une interview d’Olivier Berruyer en décembre 2021 (sur les menaces de guerre entre la Russie et l’Ukraine ; à noter que dans ses interventions ultérieures au Média, Berruyer n’a parlé que d’inflation et d’économie intérieure et pas du tout de la Russie), une interview de Jacques Sapir en mars 2022 (sur la guerre en Ukraine), une interview de Jacques Baud en septembre 2020 (sur les fake news), une interview de Michel Collon en avril 2019 (sur les « médiamensonges »), une interview de Judi Rever en novembre 2020 (sur le Rwanda).

Ecartons d’emblée « l’affaire Tolbiac ». Il n’y a là aucune trace de complotisme ni de poutinophilie. Rappelons les faits : lors de la répression par la police de l’occupation de l’université de Tolbiac par des étudiants, un témoin a affirmé avoir vu un mort. Ce témoignage, plausible dans le contexte des violences policières de l’époque qui avait vu quantité de manifestants et même de journalistes ou de simples passants tabassés, blessés ou éborgnés, avait été relayés (au conditionnel) par plusieurs médias dont Le Média (mais aussi Reporterre ou Marianne) avant que Libération puis Reporterre ne révèlent que le témoignage était faux. La rédaction du Média, comme celle des autres médias abusés, avait convenu de son erreur, en publiant ce communiqué : « Nous reconnaissons notre erreur, et nous présentons nos excuses à nos Socios ainsi qu’à ceux qui nous suivent. Nous veillerons à ce que cela ne se reproduise plus et réaffirmons notre engagement autour des valeurs fondatrices du Média. » 

Notons aussi que l’interview de Chouard en 2019 a tourné nettement au désavantage de celui-ci, qui s’est enferré dans le négationnisme après une question de Denis Robert sur les chambres à gaz, et qui s’est retrouvé coincé par les questions de Mathias Enthoven. Au point que Daniel Schneidermann s’est finalement félicité de la séquence. Personnellement, j’étais opposé au fait même d’inviter Chouard et en avais débattu à l’époque avec d’autres socios et Mathias Enthoven. D’ailleurs, Chouard avait déjà pu dérouler son mielleux credo confusionniste lors d’une émission de débats du Média, toujours avec Denis Robert. Je veux bien donc accorder ce point à Guckert.

Convenons aussi qu’Alain Corvez, invité 2 fois au Média en 2018, est surtout un habitué de la chaine de propagande russe RT, de la chaine d’extrême-droite TV Libertés et de la secte larouchienne via Solidarités et Progrès (représentée en France par Cheminade) ou le Schiller Institute. Précisons tout de même que Corvez a été invité par le très confusionniste Jacques Cotta (qui a quitté le Média dès octobre 2018), d’abord dans une émission de débats, puis dans une autre émission qui a été, elle, retirée depuis, ce qui montre que le ménage a été fait (il était bien précisé le 15 avril 2021 dans un article de Syrie Factuel, pour qui Guckert travaille aussi, que la vidéo était « disparue du web », mais cette précision a elle-même étrangement disparu de son article à charge de Conspiracy Watch, qui ne précise pas non plus que Cotta a rompu avec le Média parce qu’il ne pouvait y déployer sa vision confusionniste de la montée du fascisme en Italie).

Convenons qu’Alexis Poulin, resté fidèle à Sophia Chikirou après la première crise du Média, coche toutes les cases du confusionnisme, interviewant complaisamment Asselineau, fréquentant les médias d’extrême-droite comme Boulevard Voltaire ou Sud Radio, la chaine poutinienne RT, et ayant sombré depuis la pandémie dans les délires conspirationnistes antivax. De lui, Guckert nous dit bien qu’il a quitté le Média à l’été 2018, dénonçant sa « dérive », mais ne daigne pas nous expliquer que Poulin avait alors signé avec Serge Faubert, Léonard Vincent et Julie Maury un texte évoquant « des tentatives communautaires ou identitaires au sein de la rédaction » alors que la SDJ du Média, elle, signait un texte affirmant : « Nous aurions pu imaginer entendre cette position de la part d’un journaliste de Valeurs actuelles, pas du Média, ce qui nous choque terriblement. La SDJ fera de la reconnaissance du pluralisme et de la diversité dans notre rédaction un combat et s’oppose à toute velléité de les étouffer ou de les nier.  » Bref, Guckert énumère les problèmes en se gardant à chaque fois de préciser qu’ils ont donné lieu à des conflits, des résistances de la part de l’équipe, et in fine, des correctifs ou des départs. Guckert, tout à son récit du méchant Média « conspirationniste poutinophile », invisibilise les luttes internes contre les dérives qu’il dénonce et la victoire, au bout du compte, de celles et ceux qui ont lutté contre ces dérives.

Convenons que l’économiste Jacques Sapir a brillé aussi par son confusionnisme (appels à l’union de la gauche radicale avec le RN) et son tropisme pro-russe. Lors de son passage au Média, présenté comme spécialiste de la Russie, il a trouvé le moyen, bien que prétendant avoir quitté RT par refus de l’invasion de l’Ukraine par Poutine, de prédire une victoire russe et un effondrement de l’armée ukrainienne sous quelques jours. On a vu depuis ce qu’il en était, ce qui n’empêche pas ce prophète mal inspiré de continuer à pérorer au sujet de la puissance russe sur Twitter. Précisons au passage que le Média ne s’en est pas tenu à ce discours halluciné. Thomas Dietrich a par exemple interviewé Emmanuel Dupuy, président de l’IPSE (Institut prospective et sécurité en Europe) au point de vue radicalement opposé à celui de Sapir. Théophile Kouamouo, qui avait (hélas) interviewé Sapir, a de son côté aussi interviewé le journaliste Fabien Lassalle-Dumez qui a étudié le personnage du président ukrainien Zelensky, et présente lui aussi un point de vue très différent de celui de Sapir. Bref, Guckert, tout à son récit du méchant Média « complotiste poutinophile » invisibilise totalement les émissions du Média très critiques des actions de Poutine.

Convenons également que Jacques Baud est un habitué des médias d’extrême-droite (Valeurs Actuelles, Sud Radio, TV Libertés), même s’il a aussi été invité sur la très sérieuse, très mainstream et très publique France Info. Ne chipotons pas : le gars se répand partout en théories du complot pro-Poutine, c’est un fait.

Convenons aussi que Michel Collon est l’archétype de l’activiste confusionniste rouge brun à tendance conspi. Guckert est tout à fait fondé à pointer comme une faute pour un média de gauche le fait d’inviter ce genre de lascar. Je peux tout de même préciser que j’ai à l’époque eu l’occasion de dire ce que j’en pensais. Je suppose que d’autres, y compris au sein de la rédaction, ont argumenté aussi. Et le fait est que je n’ai plus revu Collon à l’antenne du Média depuis ce 29 avril 2019.

Et enfin, convenons que les thèses de Judi Rever sur le Rwanda, visant à mettre sur le même plan les crimes du régime de Kagamé et le génocide subi par les tutsis (thèse du « double-génocide »), voire à exonérer le pouvoir hutu de sa responsabilité dans le génocide pour en rejeter la faute sur Kagamé, relève du négationnisme. Nous avons été plusieurs à nous en émouvoir, parmi les socios et au sein de la rédaction. Résultat : cette vidéo a été retirée. Ce que Guckert, tout à son récit du méchant Média « conspirationniste poutinophile » se garde bien de mentionner.

D’après le propre décompte de Guckert, il y a donc exactement 10 vidéos (si on évacue « l’affaire Tolbiac » qui est d’un autre ordre et que Guckert mentionne juste par malveillance) accusées de véhiculer des thèses complotistes ou poutinophiles. Renseignement pris, la chaine YouTube du Média compte actuellement environ 2200 vidéos (compte non tenu des vidéos retirées par des malveillants qui avaient gardé accès à l’interface après le départ de Sophia Chikirou, de celles retirées sur injonction de Denis Robert, des podcasts ou des plus de 180 articles publiés sur le site actuel ou ceux publiés sur l’ancien site). Si on part d’une proportion de 10 vidéos au contenu contestable sur 2200 vidéos, on obtient donc un taux de 0,45%. Voilà qui aurait dû pousser Guckert à relativiser son analyse et à renoncer à tout le moins à voir dans 0,45% d’erreurs un problème systémique.

Bien sûr, on peut dire que 0,45% d’erreurs de casting, c’est encore trop. Personnellement, en tant que sociétaire du Média, les séquences évoquées ci-dessus m’ont bien piqué les yeux et les oreilles, et j’ai eu l’occasion d’exprimer mon désaccord sur les supports de discussion internes (forum du Média, groupes Facebook, commentaires sur YouTube). Mais doit-on, comme Guckert, jeter le bébé avec l’eau du bain ? Personnellement, je ne le pense pas.

Guckert ne dit pas un mot de la particularité du Média : c’est une coopérative de presse, d’un genre inédit, qui a à la fois vocation à être un média de masse (dans un but clairement affiché de contre-hégémonie culturelle face aux médias dominants et à la fachosphère), de gauche (avec une ligne humaniste, progressiste, féministe, antiraciste et écologiste inscrite dans son manifeste fondateur) et pluraliste. Ce dernier point mérite commentaire : loin d’être le média de la France Insoumise, le Média a affiché dès l’origine l’ambition de refléter différentes tendances de la gauche ; on a ainsi vu en 2017 des figures d’EELV ou de Génération.s soutenir l’initiative et y participer. Cela s’est dégradé par la suite pour des raisons à la fois externes (le rapprochement entre FI et d’autres formations de gauche esquissé en 2017 ne s’est pas concrétisé) et internes (le management de Sophia Chikirou a fait fuir du Média les « prises de guerre » comme Noël Mamère, Gaël Brustier, etc.). Mais le principe de pluralisme est resté, et le Média a continué à inviter des gens représentant différents courants de la gauche, qui compte, qu’on le veuille ou non, des composantes campiste, souverainiste… dont l’anti-américanisme et l’anti-impérialisme peuvent offrir des prises à des théories complotistes, particulièrement sur les questions internationales, voire à des compromissions avec la propagande de puissances réputées opposées à « l’Occident », comme la Russie de Poutine.

Notons que les chroniqueurs et journalistes du Média les plus compromis n’y sont pas restés longtemps. Elie Guckert a beau jeu de rappeler que Sophia Chikirou avait défendu Claude El Khal après sa chronique scandaleuse jetant le doute sur les crimes du régime de Bachar El Assad, mais il oublie de dire que Claude El Khal n’a plus jamais retravaillé pour le Média. C’est dire que la rédaction, si ce n’est Sophia Chikirou elle-même, a pu mettre fin à cette collaboration compromettante. Quant à Alexis Poulin, il a suivi Sophia Chikirou lorsque celle-ci a quitté le Média et n’a opéré qu’un bref retour sous la direction de Denis Robert, non sans contestations internes, notamment de la part de socios sur les supports de discussion. Il est à nouveau parti en 2020, en suivant cette fois Denis Robert. La capacité de nuisance de ces deux chroniqueurs aura vraiment été de courte durée. Jacques Cotta, de son côté, ne sera resté que quelques mois, en 2018.

Reste la question des invités. Elle est délicate, car pour certains socios, le Média, s’il est pluraliste, doit inviter aussi des gens de droite, voire pire, à charge pour les intervieweurs, ou d’autres invités, de montrer en paroles, par la magie du débat, les problèmes que posent les idées de droite. Personnellement, je trouve cette conception très naïve, et je m’y oppose dès que la question surgit (ce qui est récurrent). Je ne remercierai par exemple jamais assez la rédaction du Média d’avoir fait barrage aux projets de Denis Robert, qui rêvait d’organiser un débat entre le confusionniste narcissique Juan Branco et le nazi demi-mondain Alain Soral. On l’a échappé belle ! Pour autant, il y a eu au Média des émissions de débat à très large spectre, animées par le déjà mentionné Jacques Cotta (dans l’émission « Dans la gueule du loup », hélas très appréciée de nombreux socios), par Aude Lancelin (qui a ensuite sombré avec son propre média QG dans le complotisme antivax de bas étage) ou par Denis Robert (qui avait trouvé le moyen de réunir dans une même émission le confusionniste négationniste Chouard et le réactionnaire macroniste pro-Raoult Muselier !). Depuis le départ fracassant de Denis Robert, ce genre de talk-show fourre-tout a heureusement cessé, et la qualité des programmes du Média ne s’en est trouvée qu’améliorée. Car, alors que Guckert fait mine de considérer le Média comme une entité immuable qui déciderait par nature de s’adonner à des penchants « complotistes » ou « poutinophiles » ainsi qu’à un management toxique, le Média est depuis sa naissance le lieu d’âpres débats entre salarié.e.s, entre salarié.e.s et socios, entre socios… pour définir la ligne éditoriale et construire la structure : en cinq ans, les choses ont considérablement évolué. Alors que certain.e.s socios ont été lassé.e.s par les « crises », moquées avec mauvaise foi et joie mauvaise dans la presse bourgeoise (comme s’il n’y avait pas de conflits dans les médias du Capital !), je fais partie de celles et ceux qui ont vu dans ces crises des moments de clarification salutaire et des étapes inévitables dans la difficile construction d’une coopérative de presse non capitaliste. Dans l’histoire de ces cinq premières années du Média, je vois une équipe de salarié.e.s qui a résisté aux egos boursouflés, a construit un vrai collectif de travail, et s’est emparé avec les socios de la propriété des moyens de production. Ce n’est pas rien. Et c’est au fil de l’aventure et des différentes crises, malgré parfois les difficultés interpersonnelles, que la ligne éditoriale s’est affinée, grâce à des débats internes à la rédaction mais aussi avec les socios. Je peux témoigner par exemple que lorsque j’ai été en désaccord avec le choix d’inviter des personnes que je juge confusionnistes, j’ai eu la possibilité de l’exprimer et d’entamer une discussion avec un ou des membres de l’équipe. Je ne dis pas que cela a forcément eu un effet immédiat (je connais peu de gens qui disent d’emblée dans une discussion idéologique : « mais bon sang, tu as raison, je n’y avais pas pensé, j’ai vraiment fait une erreur et je vais la corriger de ce pas »), mais je sais que quelques interventions de socios, quelques débats en conférence de rédaction, peuvent, de fil en aiguille, permettre des résultats. Par exemple, l’interview de Judi Rever a bel et bien été retirée.

Cela dit, le Média continue évidemment à mener des interviews, et la question du pluralisme dans le choix des invités continue donc à se poser. A ce titre, il convient de restituer ici la mise au point faite le 24 octobre dernier par le responsable des relations avec les socios sur le forum du Média :
« Le Média (la coopérative, et donc tous ses membres) se positionne en effet favorablement sur des revendications historiques de la gauche française. Il faut cependant régulièrement rappeler que dans notre Manifeste nous appelons aussi à une pluralité des points de vue. Le Média n’est donc pas nécessairement d’accord avec les personnes invitées sur son plateau. Nos journalistes (et l’ensemble des membres de l’équipe NDLR) n’ont pas vocation à n’inviter que des gens avec lesquels ielles seraient en phase à 100%. »

Le Média, en fonction de l’actualité, donne la parole à des militants en lutte (prioritairement), à des syndicalistes, à des auteurs dans les champs des sciences sociales, de l’économie, de l’histoire, de la littérature, à des journalistes d’autres médias (indépendants le plus souvent), à des spécialistes (diplomates, experts, responsables politiques ou anciens militaires…). Les propos tenus par ces invités n’engagent qu’eux et ne reflètent pas nécessairement la ligne du Média ni la pensée de l’intervieweur. Il faut bien comprendre que le Média n’a pas vocation à être un média de niche, qui peut se concentrer sur un axe en particulier (comme Reporterre avec l’écologie, Street Press avec les violences policières et l’antifascisme, ASI avec la critique des médias, Syrie Factuel sur la guerre en Syrie, etc.). A ce compte, 0,45% de déchets, si on compare avec les chaînes du service public ou les chaines capitalistes, c’est plus qu’honorable. Et personnellement, je préfère argumenter en interne quand un invité me semble problématique que hurler avec les loups de Conspiracy Watch contre la seule coopérative de presse française vraiment indépendante, de gauche, et visant une diffusion de masse. Ayant notamment passé du temps sur le forum du Média à debunker les conneries antivax et à déconstruire le culte de Raoult, je suis très content que le Média n’ait pas sombré dans cette fange, contrairement à Aude Lancelin, et ait donné par exemple la parole à Nathan Pfeiffer-Smadja au sujet du covid pendant que Lancelin invitait le grotesque Perronne, que Denis Robert donnait tribune à Brice Perrier, que les médias capitalistes s’arrachaient le mage Raoult et que la fachosphère déroulait le tapis rouge à Fouché, Wonner et autres guignols antivax.

En cinq ans, une dizaine de personnalités problématiques ont proféré des conneries complotistes ou plus ou moins poutinophiles sur 0,45% des programmes du Média. Mais pendant le même temps, le Média a enquêté sur les liens financiers du RN avec Poutine, sur les turpitudes de la Françafrique, sur les violences sexuelles dans les auto-écoles, sur les violences policières en France ou en Colombie, sur le putsch en Bolivie, sur le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, sur la répression au Maroc, sur le sort des migrants, sur l’évasion fiscale, sur les déserts médicaux, sur le traitement des troubles psychiques, sur les impostures de Raoult, sur les morts invisibles du coronavirus, sur les luttes écologistes, sur des expériences de sécurité sociale alimentaire, sur l’impunité des franquistes en Espagne, sur les morts au travail, a produit ou diffusé des documentaires sur la lutte féministe et municipaliste du Rojava, la révolte à Hong Kong, la ruine du Liban, ou la guerre franco-russe en Centrafrique, a donné la parole à des intellectuels comme Bernard Friot, Frédéric Lordon, Jacques Rancière, Gérard Noiriel, des écrivains comme Joseph Andras, à des économistes comme Thomas Porcher, à des spécialistes du génocide rwandais comme Stéphane Audoin-Rouzeau et Hélène Dumas, a suivi au plus près les luttes (mouvement pour les retraites et grèves, gilets jaunes, cheminots, sans papiers…), les débats à l’assemblée, les difficultés de la gauche en Amérique latine, la situation politique au Chili ou en Haïti, les débats autour de #meetoo, a exposé la réalité du massacre du 17 octobre 1961, de la privatisation rampante d’EDF, a creusé la question des origines du capitalisme patriarcal, a analysé les rapports du GIEC sur la catastrophe climatique, a déconstruit les discours politiques et médiatiques en France, a exploré les conséquences sur les libertés publiques du poids des GAFAM, a décrypté les mensonges de la macronie et du patronat au sujet du salaire des raffineurs, a suivi les élections américaines de 2020, les élections françaises de 2022 (en partenariat avec Street Press, Regards, Politis, Radio Parleur, le Bondy Blog), a soutenu confraternellement les enquêtes de Off Investigation sur la macronie…

Non, le Média n’est pas une « webtélé insoumise aux accents complotistes ou poutinophiles ». C’est une coopérative de presse indépendante, de gauche, dont les programmes, à 0,45% d’exceptions près, sont d’utilité publique et même indispensables pour contrer l’hégémonie culturelle du bloc bourgeois et de la fachosphère. Ajoutons que les quelques écarts (0,45% !) sont aussi le reflet de questions qui agitent la gauche dans sa pluralité en France, mais également des interrogations posées par un monde dont les médias franco-français oublient parfois qu’il n’a pas de centre. C’est une chose (nécessaire) que de reconnaître et décrypter la propagande poutinienne (et je ne reproche certainement pas à Guckert de s’y coller), mais encore faut-il aussi essayer de comprendre pourquoi cette propagande complotiste et mensongère trouve un tel écho, notamment en Afrique. Le Média a par exemple évoqué la présence des milices russes Wagner au Mali ou en Centrafrique, mais il ne s’est pas contenté de la dénoncer, il a aussi analysé les causes du désaveu de la Françafrique qui laisse un boulevard aux manigances de Poutine. Une telle analyse est précieuse, et elle n’a rien de « poutinophile ».

Pour conclure, signalons aussi à Elie Guckert que le « clap de fin » n’est pas à l’ordre du jour pour le Média, malgré les attaques devant les Prud’hommes de Denis Robert. Le Média a en effet fait appel du jugement de première instance qui lui était défavorable, et les procédures sont loin d’être épuisées. De nouveaux éléments peuvent être versés au dossier. En tout état de cause, le Média a survécu à la saisie demandée par Denis Robert et est bien décidé à se défendre et à contre-attaquer. L’aventure est loin d’être terminée.

Soutenez le Média !

https://www.lemediatv.fr/soutien

Soutien au Média face aux rageux

Des ex-socios du Média ont publié une vidéo pour nuire au Média et pousser les socios à rejoindre le nouveau média concurrent de Denis Robert.

Le texte de cette vidéo est mensonger sur bien des points. Si j’étais déçu par Le Média au point de cesser d’être socio, je m’en irais soutenir une autre cause sans user mon énergie à produire une vidéo de dénigrement. Cette démarche malveillante destinée à nuire est vraiment curieuse. Voici quelques réfutations de ce texte :

« et alors que la direction maintient une opacité sur de nombreuses informations » 

La direction a donné de nombreuses informations, quand elle le pouvait, contrainte bien évidemment par les procédures en cours, pendant que d’autres organisaient des fuites dans Le Monde ou sur le forum. 

« Le licenciement du dernier directeur de la rédaction, comme ses conditions, constituent une énième crise grave pour Le Media et altèrent fortement la dynamique qui était à l’œuvre. » 

Non, la dynamique est toujours à l’œuvre. Et c’est précisément les ambitions personnelles du dernier directeur de la rédaction qui y auraient fait obsctacle s’il avait pu se maintenir de force. 

 « de nombreux socios partent ou réduisent le montant de leurs abonnements, les dons reculent, les audiences baissent, des intervenants se décommandent, les risques de contentieux s’accumulent, etc. » 

 Des socios sont partis, en raison d’une intense campagne de dénigrement et de calomnie. Mais il en reste plus de 10000, je crois, et les dons arrivent toujours (mais bien sûr, le défi reste d’en recueillir davantage et de faire venir de nouveaux socios). Les audiences restent bonnes. Et deux émissions ont même récemment approché le million de vues sur YT en très peu de temps. De nombreux intervenants passionnants sont toujours interviewés par le Média : des économistes (atterrés), des syndicalistes, des scientifiques, des militants, des intellectuels, des travailleurs en lutte… Les contentieux, Denis Robert en a causés, d’autres avant lui aussi. Cela ne veut pas dire que le Média n’obtiendra pas gain de cause. 

 « En l’absence d’informations sur la situation économique, il est impossible de connaître la situation exacte du Media. Mais, de sources internes, elle n’est pas bonne et l’information n’est pas donnée. » 

 Le compte de résultat 2019 avait été publié en mars 2020. Nous sommes en janvier 2021. Il est donc parfaitement mensonger d’affirmer que des informations ne seraient pas données. La situation économique du Média est toujours précaire, bien entendu, mais c’est le cas depuis le début de son histoire, et il n’y a là rien de nouveau. 

 « D’autre part cette situation divise une équipe qui était en train de construire un équilibre éditorial en cohérence avec son texte fondateur : d’autres départs sont à prévoir. »

Il est évident que des partisans de Denis Robert vont le rejoindre dans son nouveau projet. On pourrait attendre qu’ils aient l’honnêteté de le faire sans faire d’obstruction interne et sans essayer de négocier leur départ en termes financièrement impossibles pour le Média. En tout cas, l’équipe qui reste active et les nouvelles jeunes recrues qui dynamisent le contenu s’inscrivent bien dans un équilibre éditorial en cohérence avec le manifeste, n’en déplaise aux rageux et aux idolâtres. 

 « Comme lors des précédentes crises, les socios n’ont pas été informés des tensions qui traversaient les équipes. » 

 Lorsqu’il y a des tensions dans un collectif, il est rare qu’il en fasse état avant que ça ne devienne paroxystique, parce que justement, les gens essaient d’abord de s’accommoder. Et c’est un peu présomptueux de penser que nous socios aurions pu obliger Denis Robert à respecter son engagement initial de s’insérer dans un comité de rédaction, si ses propres collègues n’y sont pas parvenus. 

 « Une fois le conflit ouvert, les socios ont été pris à partie pour trancher dans ce conflit avec pour seule alternative de devoir choisir un camp, abreuvés qu’ils sont d’informations parcellaires via la presse, les réseaux sociaux et le forum du Media. » 

 Les fuites à la presse ou dans le forum ont émané du camp Robert. L’équipe en place n’a fait que réagir, parfois sur les réseaux sociaux, où elle se faisait interpeller et mettre en accusation sur la base de mensonges. 

 « Cette logique de camp, nous nous y sommes refusés. De nombreuses propositions ont été faites pour sortir de cette crise par le haut ». 

 Un certain nombre de signataires de ce texte ont au contraire pris parti et ont mené une guerre de tranchée sur le forum pour obtenir la démission de la direction, le retour de Denis Robert, un plébiscite, le report de la construction de la SCIC, etc., applaudissant les socios qui annonçaient leur départ, attisant la rage, et invectivant les membres de l’équipe qui osaient venir donner leur point de vue.

« Pourquoi la direction du Media a-t-elle toujours posé des conditions préalables rendant impossibles toutes les tentatives de médiation qui ont été initiées en interne ? Pourquoi a-t-elle toujours rejeté l’idée de l’intervention d’un tiers professionnel des situations de crise ? » 

 Affirmation mensongère. Le Média n’a rien rejeté du tout. C’est au contraire Denis Robert qui a torpillé la première tentative de médiation en publiant une vidéo insultante et diffamatoire, et qui a refusé ensuite de retirer cette vidéo, cause principale de son licenciement. S’ensuit une série de questions dans la droite lignée du « sealioning » (technique de trolling : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sealioning) déjà utilisé sur le forum. Il s’agit de poser des questions auxquelles il a déjà été répondu, non pas pour obtenir des réponses (qu’on a déjà) mais pour faire des sous-entendus polémiques et diffamatoires, et jeter donc de l’huile sur le feu. L’AG de l’asso, pas plus que les socios, n’avaient à statuer sur la crise, qui était interne à la rédaction, pas plus que sur le licenciement, qui relevait du droit du travail. 

 « Pourquoi la direction n’a-t-elle pas su mettre un terme à la relation de travail avec Denis Robert de manière pacifiée ? » 

 Cette fausse question est particulièrement tordue. En effet, c’est Denis Robert qui a empêché que les choses se déroulent de manière pacifiée, en faisant fuiter des échanges internes et en publiant une vidéo insultante. 

 « Pourquoi, alors que les problèmes de souffrance au travail évoqués comme étant à l’origine du licenciement de Denis Robert seraient anciens, la direction ne les a- t-elle pas traités plus tôt alors qu’elle en aurait été alertée préalablement ? » 

 Autre question particulièrement retorse parce que négligeant le fait que Denis Robert n’était pas un salarié lambda mais faisait bien partie du comité de direction. La direction, c’était lui aussi. Et de nombreuses tentatives ont été faites justement pour résoudre les problèmes posés par le management de Denis, la dernière consistant justement, non pas à le licencier, contrairement à ce que prétendent ici les rageux, mais à lui proposer de conserver ses émissions et son salaire et de ne plus diriger la rédaction. C’est cette solution qu’il a refusée et à laquelle il a réagi par la vidéo diffamatoire qui a causé son licenciement. 

 « Ainsi, nous relevons que les ressorts de cette crise ont été initiés une fois la situation économique du Media redressée. » 

 Le situation économique du Média n’a pas été redressée. Elle est toujours précaire, et les comptes ont juste bénéficié, au moment du départ de Denis Robert, d’un report de charges, et des aides accordées dans le cadre du confinement. Denis Robert a contribué (personne ne le nie) au développement du Média, travail collectif et non d’un seul homme, mais il n’a pas opéré de miracle financier. Certains de ses projets (partenariat avec des mécènes, régie publicitaire) allaient même à l’encontre de l’indépendance du Média. 

 « Aucun bilan (financier, social) n’y est présenté en fin d’année, pas plus que le projet de l’association (l’évolution de ses objectifs, de sa stratégie, de ses moyens) ». 

 Les comptes ont été présentés chaque année à partir de 2019. Le projet de l’association, qui devait être la création d’une SCIC de presse, a été contrecarré plusieurs fois par les différentes directions. Mais les statuts de la SCIC, dans la rédaction desquels Denis Robert ne s’est pas investi, ont été votés par les socios, et le calendrier, quoi que perturbé par la crise, se poursuit. 

 « Le président, Bertrand Bernier, a été désigné par défaut lors de la précédente crise. » 

 Dans une structure comme celle du Média, les désignations sont toujours un peu « par défaut », dans la mesure où se retrouvent désignés celles ou ceux qui ont bien voulu se dévouer, et ils ne sont pas des millions. Bertrand Bernier a été depuis sa nomination un élément important du Média, et a permis à celui-ci de se doter d’une capacité de production de haut niveau. 

 « Dans les faits, Bertrand Bernier, arrivé en cours de route dans le projet – sans légitimité particulière et ayant acquis ses fonctions par défaut » 

 Présentation vraiment crapuleuse. Selon une telle logique, Denis Robert était aussi arrivé en cours de route, avec une expérience de journaliste de presse écrite et de documentariste, mais aucune expérience de présentation télévisuelle ni de management. Sans légitimité particulière, donc. C’est une manière malhonnête de présenter les choses. Tous ceux qui travaillent au Média ont légitimité à le faire. 

 « dirigeant sans projet adossé à un modèle économique » 

 Accusation infondée. Le projet est fixé depuis le départ et n’a pas changé : produire un média de masse accessible gratuitement et financé par les souscripteurs. Tout autre « modèle économique », reposant par exemple sur le financement par de la publicité ou par de riches mécènes, serait en revanche une remise en cause du projet. 

 « Pendant la crise, ils ont récusé toute introduction d’un tiers favorisant la prise en compte des différents points de vue et le respect du droit du travail. » 

 C’est faux. Ils ont récusé une initiative biaisée qui posait comme préalable à la discussion l’abandon du projet de réorganisation de la rédaction. 

 « Fait aggravant, il s’avère que M. Gautheron a quitté depuis sa fonction de présidence, tandis que M. Théry chercherait actuellement à le faire. Comment ces personnes ont-elles pu prendre des décisions si lourdes pour l’avenir du Media, sans en référer à l’AG, alors qu’elles n’en assumeront pas les conséquences ? » 

 Précisément parce que ces présidents, loin d’être une « direction » au sens habituel du terme dans les entreprises capitalistes, étaient les représentants d’un collectif de travail, et qu’ils ont agi dans le sens de l’intérêt de ce collectif. 

 « Nous avons été nombreux à y exprimer notre stupéfaction, à demander des réponses, à proposer des actions alternatives, à constater les incohérences et les refus de répondre, et à exprimer notre mécontentement voire notre colère. » 

 Dit autrement : quelques rageux ont voulu obtenir satisfaction de toutes leurs lubies, n’ont pas accepté les réponses qui leur étaient données, et une petite poignée à présent impliquée dans ce texte et cette vidéo visant à nuire au Média, ont alors pourri littéralement le forum pendant des jours. 

 « Globalement, ce forum n’est pas exploité comme un outil au service de l’implication des socios dans le fonctionnement du Media ». 

 Si. C’est bien ce qu’il est. 

 « Les règles de fonctionnement restent floues, la modération obscure et autoritaire, les bannissements expéditifs, les décisions arbitraires. » 

 C’est faux. Les règles sont exposées clairement en tête du forum. La modération est transparente, rare, et collégiale, les bannissements exceptionnels et motivés par des faits. 

 « Ainsi plusieurs d’entre nous ont été bannis du forum pour avoir critiqué les décisions de la direction du Media. » 

 C’est faux. De très rares rageux (3 ou 4) ont été bannis non pour leurs critiques mais pour des manquements au règlement du forum et des comportements inadmissibles. 

 « La rédaction de la newsletter, qui doit rapporter les échanges et la vie du forum auprès de l’ensemble des socios, pose également problème. Chaque sujet proposé par les socios est soumis à un droit de véto de la direction du Media. Ses décisions ne sont jamais motivées. Elles sont toujours irrévocables. Rien dans la newsletter n’appartient donc vraiment aux socios. Nous n’avons pas pu nous en servir pour informer l’ensemble des socios de nos analyses et de nos initiatives, ni pour faire état de la stupéfaction et du mécontentement pourtant largement majoritaires sur le forum. » 

 La newsletter n’a pas du tout la fonction inventée ici de toutes pièces. Son rôle est d’informer les socios sur les programmes du Média. C’est la newsletter du Média, pas la newsletter des socios. Des socios du forum ont obtenu d’y glisser une petite synthèse de 3 ou 4 fils de discussion du forum afin de donner envie d’aller sur celui-ci. Il n’a jamais été question que ce « communiqué des socios » soit un moyen de propagande pour une faction ni que la newsletter du Média relève de la responsabilité des socios. 

 « La SCIC n’aura pas d’incidence directe sur le fonctionnement du forum, qui est le lieu de candidature des socios à l’AG. Ainsi, tout semble organisé pour verrouiller le fonctionnement de la SCIC, comme l’est aujourd’hui celui de l’AG. » 

 Affirmation fausse autant que confuse. Il n’y a jamais eu de candidature de socios à l’AG via le forum. Les socios présents actuellement à l’AG ont été cooptés après la crise Lancelin, ce qui constituait une ouverture par rapport au système verrouillé créé par Chikirou. La SCIC permettra justement de passer à une vraie participation directe des socios à l’AG et à la désignation de représentants au CS. 

 « Dans cette crise, nous considérons ainsi que les présidents des sociétés et de l’association Le Media ont été mus par la volonté d’évincer Denis Robert de sa fonction de directeur de la rédaction, quitte à évincer sa personne, davantage que par le souci de gérer la situation dans l’intérêt social des entreprises dont la gestion leur était confiée. » 

 Cette affirmation ne repose sur rien. On peut tout autant penser au vu des éléments rendus publics que Denis Robert prévoyait d’évincer une partie des salariés du Média pour les remplacer par des amis à lui. Cela reste dans tous les cas de la spéculation. Le fait est que c’est bien Denis Robert qui s’est rêvé en directeur général du Média, contredisant alors ses engagements précédents, lorsqu’il affirmait : « je ne veux pas de pouvoir ». 

 « Le Media aujourd’hui n’incarne pas les valeurs affichées dans son manifeste. » 

 C’est faux. Non seulement le Média les incarne toujours, mais bien mieux que le nouveau média concurrent de Denis Robert qui affiche vouloir s’ouvrir aux mécènes. 

 « Nous constatons que chaque année le Media est secoué par une crise violente, que ses moyens se délitent et que nos contributions sont accaparées par des conflits qui entravent le développement du Media dans sa capacité à réaliser les promesses formulées lors de sa création. » 

 Faisons mentir cette prophétie autoréalisatrice de rageux qui cherchent à couler le Média par leur propagande mensongère. Le Média réalise bien ses promesses, mais il a toujours besoin de nos contributions pour continuer. 

 « Ainsi, la résolution de cette crise s’apparente pour nous à la confiscation du Media par un petit groupe (dont fait partie la direction) qui s’est accaparé tous les pouvoirs et qui s’octroie les moyens que nous lui donnons pour des finalités que nous ne partageons pas, en n’hésitant pas à discréditer et à exclure tous ceux pouvant s’opposer à lui. »

  Bien au contraire, la résolution de cette crise s’apparente au maintien du projet du Média malgré les tentatives de Denis Robert pour s’approprier la structure et malgré les tentatives de ses partisans les plus enragés pour la déstabiliser.

« nous quittons le Media »

C’est votre droit, mais pas la peine de faire tout ce foin ni de chercher à le détruire. Personne ne blastera notre Média.

Pas fute fute

« Moi je trouve qu’il [Macron] est pas bien fute fute comme mec. (…)
J’ai des arguments. Par exemple je suis persuadé qu’il ne comprend pas l’économie et que c’est lui, l’homme du passé. En fait, il dit des trucs… — enfin, moi j’étais aux premières loges pour voir la révolution néolibérale anglaise, puisque j’ai fait ma thèse à Cambridge, que mon fils est né et est resté en Angleterre, que j’ai des petits-fils britanniques, donc je suis — en fait, il parle comme les Anglais des années 1980. »

Emmanuel Todd, entretien au Média, 25 janvier 2017.

Continuer la lecture de « Pas fute fute »

Coming out

« Ce qu’il [Emmanuel Macron] fait, c’est un peu le genre de politique de droite que faisaient les socialistes tout en se racontant qu’ils étaient socialistes et qu’ils étaient de gauche et qu’ils faisaient les choses, donc, un peu lentement. Donc il fait un peu plus que les socialistes des politiques de droite, mais je pense que ça lui est permis parce que la réalité du macronisme, pour moi, elle est dans l’électorat. Je ne m’intéresse pas beaucoup aux hommes politiques, je m’intéresse aux électorats. C’est une sorte… pour moi… c’est une sorte de coming out de droite d’un électorat socialiste qui voulait encore se raconter qu’il était de gauche. Et donc il y a une sorte de libération… donc une sorte de dérive à droite… et donc on voit dans les sondages, ça marche pas mal : la fusion des électorats de droite et ex-socialistes qui se sont retrouvés en Macron s’opère bien. (…) Continuer la lecture de « Coming out »

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